lundi 16 février 2015

Le jour où j'ai démoulé la Noisette.

Cela faisait très exactement (d'après les calculs savants de ma gynéco) neuf mois et un jour que j'étais enceinte. Tout au long de ces derniers mois, j'avais tellement bouffé cédé aux avances faites par mon insatiable gourmandise, que j'étais devenue toute ronde. Ce terrible pêché du sucre et du gras avait provoqué des dérèglements tels que mon corps était perdu. Pour te faire une idée des dégâts engendrés, figure-toi que même mes cuisses et mon cul croyaient qu'ils étaient enceintes. Il fallait les voir ! Ils gonflaient à vue d'oeil. C'est qu'ils nous faisaient une grossesse nerveuse les malheureux ! J'étais donc devenue un énorme marshmallow tout rond qui, bien qu'heureuse de couver, n'en pouvait plus. Les deniers jours de grossesse furent pénibles et même angoissants. J'étais devenue une fidèle lectrice du très célèbre forum Doctissimo, catégorie grossesse, sur lequel toutes les poules sur le point de pondre se ruent. J'étais à la recherche du moindre astuce capable de provoquer un début de travail. Autant te dire que mes vitres et mon sol brillaient, que je tentais le plus possible de mouvoir mon drôle de corps ovoïdal, que j'avais bu des litres et des litres de tisanes à base de feuilles de framboisiers à t'en faire sauter le bouchon et que j'avais même adressé de drôles de prières à la lune. Après tous ces efforts, j'étais donc à l'affût du moindre signe qui m'indiquerait si oui ou merde, c'était enfin pour aujourd'hui. A chaque passage aux toilettes, j'examinais alors ,entre autres, le fond de ma culotte pour voir si ce fameux tampon muqueux s'était enfin fait la malle, mais rien. Que dalle. Il ne se passait jamais rien. Pour passer le temps et tenter d'apaiser mes angoisses montantes vis-à-vis de la délivrance, je me décidai donc à traquer et à dévorer tous les récits d'accouchement sur la toile. (Coucou petite poule à terme, je te vois ! )



Le matin même, nous nous étions rendus, Monsieur Pépito, mon bidon, mes kilos et moi-même, à la maternité pour un petit contrôle. C'est que nous étions à JJ de ma DPA. Et comme je suis une ouf, j'avais convaincu Monsieur Pépito de nous y rendre à pieds. (N'oublie pas que mon gros corps doit se mouvoir pour déclencher le travail) Une souriante sage-femme qui répondait au nom de Stéphanie nous accueillit. Nous ne nous connaissions que depuis deux minutes qu'elle me demandait déjà de me mettre nue et de lui présenter mon entre jambe. Après un rapide toucher vaginal (toi même tu sais), le verdict tombe. Mon petit col commence à se sociabiliser. Il s'est ouvert de deux cm. Elle me proposa alors un décollement des membranes, histoire de déclencher le travail. Mais voilà, je n'avais lu aucun témoignage de poules s'étant faites décoller les membranes. Merde. J'hésitais donc puis, Stéphanie m'assurant que ça ne me ferait qu'un petit coup de chaud, j'acceptai. (Coucou petite poule en plein travail, tu veux un vrai conseil ? Ne crois jamais les sages-femmes qui te jurent que ça ne fera pas mal. Tu douilleras ta race.) Une fois ce petit acte effectué et 30 minutes de monitoring plus tard, nous avons l'autorisation de rentrer chez nous et de revenir plus tard, quand le travail aura vraiment commencé. Sur le chemin du retour, nous nous arrêtons à la pâtisserie pour acheter une énorme boite de macarons colorés. Ben quoi ? Je vais accoucher dans les prochaines 48  heures alors je fais ce que je veux. Et puis, j'ai déjà pris 21 kilos alors je ne risque plus rien !


Je passe le reste de la journée vautrée sur le canapé familial à regarder la télévision, à lire tout et surtout n'importe quoi à propos des accouchements. Je vérifie une dizaine de fois que la valise pour la maternité soit bien complète, je fais des va-et-vient incessants entre la chambre de mon bébé qui se fait désirer et le salon, je profite de mes derniers instants de grossesse. L'après-midi passe, la soirée également et pas l'ombre d'une contraction à l'horizon ni la moindre substance bizarroïde dans le fond de ma culotte.

A minuit, le travail commence, je le sens. Les contractions se joignent enfin à nous. Je me réjouis, nous allons enfin pouvoir découvrir la jolie petite frimousse de notre petite fée. Au bout d'une heure, les contractions se font régulières. Monsieur Pépito avait pris le soin de noter sur son petit carnet l'heure à laquelle chacune d'entre elles se faisait sentir. Il semblerait qu'elles surviennent toutes les trois minutes. Nous nous rendons donc à la maternité.

Une autre sage-femme nous accueille. Il s'agit d'Aurélie. Elle m'invite elle aussi à me foutre à poil, à me peser puis à lui présenter mon fondement avant. Avec ces contractions de fou qui commencent à bien piquer, je suis certaine que Berthe (col / Berthe / col Berthe, tu saisis ?) s'est ouverte davantage.

Quand le verdict tombe, j'ai envie de pleurer, rien n'a bougé. Berthe fait son asociale, elle n'a pas daigné s'ouvrir davantage. Aurélie me dit que malgré les contractions, je suis en faux travail. Elle m'énerve. (Coucou femme à terme ! Sache que si on t'annonce que tu es en faux travail, cela signifie que tu douilles, mais pour rien car les contractions n'ont aucun effet sur ton col. Courage !) Afin de déclencher un vrai travail véridique et de soulager ma douleur, on me fait une piqûre sur les fesses. Je crois que c'était une piqûre de morphine. C'est avec émotion que je t'annonce qu'il n'existe pas de meilleure drogue au monde que la morphine. Elle est à peine injectée dans tes fesses que tu ressens déjà une vague délirante et apaisante t'envahir. Sache que cette piqûre magique m'a fait découvrir un monde que jusque là j'ignorais. Il s'agit du monde merveilleux des guimauves aux couleurs pastelles. A chacune de mes contractions, elles étaient là, à danser devant le monitoring et à me faire des sourires. C'était fantastique. Tout le monde il était beau. Jaloux de ma nouvelle relation avec les guimauves, Monsieur Pépito a pris son téléphone et m'a filmée en train de décrire le magnifique spectacle qu'elles m'offraient là dans cette petite salle de travail.  Bercée par cette merveilleuse farandole, je m'endors. Parfois, je me réveille en sifflant des noms d'oiseaux quand certaines des contractions piquent un peu trop fort. Mais globalement, je vais bien.

Vers cinq heures du matin, les contractions s'intensifient. Là c'est sûr, le vrai travail véridique de la vérité vraie est en marche, j'en mets mes lèvres à couper ! Je me demande d'ailleurs à ce moment là ce qui m'a pris d'avoir voulu un faire un bébé et ai envie de tous les planter là et de rentrer chez moi.  Après tout, ils n'ont qu'à se débrouiller seuls pour le sortir ce petit bébé. Mais on m'annonce que ce n'est pas possible, Il va donc falloir que je sois un peu plus courageuse. Après une vérification, on m'annonce que Berthe n'a pas fait sa radine. Elle a offert deux centimètres supplémentaires de vue plongeante sur mon utérus. Aurélie me propose alors la péridurale, sans réfléchir, j'accepte.

Quelques minutes plus tard, l'anesthésiste de garde arrive dans la chambre. Et merde.. il s'agit de celle que j'avais vue lors de la consultation obligatoire au début du 9e mois de grossesse. Lors de cette consultation, je lui avais dit que non merci, je ne voulais pas de péridurale car je préférais de loin un accouchement qui soit le plus naturel possible pour mon bébé et moi-même. Ce à quoi elle me répondit qu'un accouchement était un phénomène certes naturel, mais très douloureux et que ce n'était pas pour rien que la péridurale avait été inventée. Ce à quoi je lui rétorquai fièrement que de toute façon, les femmes et les animaux femelles mettaient au monde leurs petits depuis la nuit des temps et que par conséquent, je serai apte à gérer le jour J. Et le jour J, nous y sommes justement. Elle entre donc, tient mon dossier médical entre ses mains et me lance un sourire. Je crois qu'elle m'a reconnue et que son sourire  me nargue et veut me dire : " Ah ! Dis, j'te l'avais pas dit ?!  Hein que ça fait mal, hein ?!"  A ce moment là, j'ai envie de me planquer sous mon bidon, je me sens vraiment ri-di-cu-le.

Nous papotons, les minutes passent. Elle est en réalité très gentille et m'a avouée que je n'étais pas la première femme enceinte à changer catégoriquement d'avis en cours de chemin. Je mets donc ma fierté de côté. Et nous attendons la prochaine contraction pour me poser cette divine péridurale. (Coucou femme à terme ! Sache que quand on t'aura enfilé cette énorme aiguille dans le dos, tu vénéreras ton anesthésiste. Si ton bidon n'était pas aussi gros, tu t'agenouillerais presque pour lui baiser les pieds !)

Une fois posée, les douleurs s'atténuent. C'est ma-gique. La péridurale, c'est un peu le Sacro Saint Graal de toute femme en plein travail. Enfin, quand ça fonctionne. Car des copines m'ont déjà dit que pour elles, la péridurale n'avait eu aucun effet. Mais moi, je m'en tape les hormones car sur moi, c'est opérationnel. Oui, c'est chacun pour sa gueule en cas de douleurs aussi intenses.

Il est 8 h quand l'équipe change. On nous présente la nouvelle sage-femme qui nous accompagnera pour le démoulage de la Noisette. Je suis un peu déçue de ne pas "finir" avec Aurélie qui s'était si bien occupée de nous. Mais comme Elodie, la nouvelle, nous met très vite en confiance, ça me va aussi.

Elodie commence par regarder si le travail avance bien. Verdict, j'en suis à 5 cm. Plus que 5 autres centimètres avant de passer à l'action. Monsieur Pépito n'a pas dormi de la nuit, et pour cause, il l'a passée fixé sur un minuscule tabouret tellement pourri que des escarres commençaient à apparaître sur son joli petit derrière. Sache que soucieux à l'idée de manquer quoi que ce soit de cette partie de démoulage, il n'a pas quitté une seule seconde la salle de travail, pas même pour aller soulager sa vessie. Malgré mes différentes tentatives de négociation, il n'a pas voulu non plus sortir pour se nourrir. Je commençais à m'en faire pour lui. J'avais peur qu'en pleine action, il nous fasse une crise d' hypoglycémie. C'est alors qu'Elodie parvint à le convaincre. Elle lui assura qu'il pouvait sereinement rentrer à la maison pour se rafraîchir et faire le plein de sucres car, de toute façon, le travail n'avance vraiment pas bien vite. Il est donc 8h45 quand Monsieur Pépito quitte la maternité.

A 9h30 on vient à nouveau mettre le nez dans mon fondement avant. Et là, c'est la panique. Voilà que Berthe s'est lâchée subitement. Elle est ouverte à 9 cm. On appelle vite Monsieur Pépito car il va devenir papa plus tôt que prévu. Je lui téléphone, il lance un : "Je le savais que je ne devais pas partir , je le savais !" Mais heureusement, nous n'habitions qu'à deux pas de la maternité. Il arrive donc quelques minutes à peine après avoir raccroché.

A 10h00, c'est le moment d'entrer en action. Elodie me demande de faire comme dans les cours de préparation à l'accouchement. Sauf que moi, eh bien, ces cours là, je ne les ai pas suivis. Enfin, je m'y étais intéressée quand même. Mais plutôt que d'aller dans un espèce de club, j'ai préféré faire mon autodidacte en visionnant des vidéos en ligne grâce à YouTube. Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ? Une contraction arrive, on fait un premier essai de poussée. Il paraît que je me débrouille comme si j'avais fait cela toute ma vie. Me voilà flattée. Mais bon, je n'accoucherais pas tous les jours non plus quand même !

Comme la poche des eaux ne s'était pas rompue spontanément, on me l'a perce. C'est alors que j'entends un gros SPLASH. Et c'est parti, je pousse de toutes mes forces. Tout se passe comme dans mes rêves. La sage-femme et l'auxiliaire de puériculture m'encouragent. C'est comme dans Baby Boom. L'Homme est très présent et assure grave. Tout va très vite. On me dit ensuite qu'une énorme touffe de cheveux noirs se présente, ça me donne la pêche et alors, je pousse encore plus fort. Au bout de dix minutes à peine, notre petite fée d'amour pousse son premier cri et vient se nicher dans le creux de ma poitrine. Elle est enfin là, elle sent la noisette, elle va bien, je vais bien, nous sommes trois.



Nous étions donc en mai 2013. Dehors il pleuvait, mais dans nos coeurs, il faisait chaud puisqu'une magnifique petite fée, la nôtre, était née.

Je n'ai pas eu d'épisiotomie. Et je n'ai pas fait caca. Enfin, je ne crois pas..

Maternellement vôtre.
Ella.


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6 commentaires:

  1. Gnooooo il est beau cet article *--* Merci de partager tout ça avec nous ! (Noisette, c'est comme ça que j'appelais mon petit numéro deux ^^)

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  2. Merci beaucoup ! Tu es la première à me laisser un commentaire ; ça me rend toute chose ! hihi (C'est que tu as de très bons goûts alors ! )

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  3. Superbement écrit, humour et émotion, j'ai adoré !

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  4. Très bel article :) Je suis encore loin d'avoir des enfants mais être maman c'est ce que j'ai toujours voulu, alors cet article était très sympa à lire! Ca fait rêver si j'ose dire haha

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    1. Merci pour ton commentaire ! Contente d'avoir pu te faire un peu "rêver" alors :)

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